« C'est une blague ? » Quand John Williams se met au piano pour jouer deux notes qui se répètent (Mi-Fa, Mi-Fa, Mi-Fa...), Spielberg se demande si le compositeur ne se moque pas de lui. Deux notes pour illustrer les Dents de la mer ? Oui et c'est son coup de génie, incarnation terrifiante du requin qui n'apparait pas à l'image. En ouverture du thème principal, le contrebasson illustre la profondeur des océans. Puis, les cordes enroulent le fameux ostinato Mi-Fa qui monte en tension, une double évocation du requin fondant sur sa proie et nos battements de cœur que la peur accélère. Plus loin, des attaques de cuivres tranchent la partition comme les dents dans la chair. En fermeture, un fondu signale l'éloignement de la menace... et la promesse de son retour. Alors que le requin mécanique « Bruce » fut en panne pendant 90% du tournage, obligeant Spielberg à réduire au minimum sa présence à l'écran, le Mi-Fa de John Williams se trouva être bien plus angoissant que le prédateur lui-même. Quarante ans après, son pouvoir n'a pas faibli. Deuxième Oscar pour John Williams et cauchemars pour tous.