Le Futurisme est un mouvement artistique européen du début du XXe siècle qui rejette la tradition esthétique et exalte le monde moderne, la civilisation urbaine, la machine et la vitesse. Il s’épanouit particulièrement en Italie, encouragé par Mussolini qui exploite l’éloquence agressive des artistes (tout au moins au début) pour mettre en place un régime dictatorial. Dans leur manifeste, ils déclarent notamment : « Nous chanterons les grandes foules agitées par le travail, le plaisir ou la révolte, les ressacs multicolores et polyphoniques des révolutions dans les capitales modernes, la vibration nocturne des arsenaux et des chantiers sous leurs violentes lunes électriques, […] les locomotives au grand poitrail, qui piaffent sur les rails, tels d’énormes chevaux d’acier bridés de longs tuyaux, et le vol glissant des aéroplanes, dont l’hélice a des claque¬ments de drapeau et des applaudissements de foule enthousiaste. » C’est Luigi Russolo qui mettra en œuvre ce programme pour le moins tonitruant en réalisant un orchestre de machines sonores (15 bruiteurs, 3 bourdonneurs, 2 éclateurs, 1 tonneur, 3 siffleurs, 2 bruisseurs, 2 glouglouteurs, 1 fracasseur, 1 stridenteur, 1 renâcleur) : écouter Éveil de la cité et voir ci-dessous.

Dans son manifeste intitulé L’Art des bruits, Russolo théorise le bruitisme. Par son caractère provocateur, son travail relève manifestement de l’anti-art. D’ailleurs ses idées sont reprises pour leur anticonformisme par John Cage qui compose en 1939 sa série des Imaginary Landscapes (Paysages Imaginaires) : il y combine des éléments tels que bruits enregistrés, percussions, postes de radios... Auparavant, il avait déjà intéressé Varèse, qui introduit des éléments bruitistes dans sa musique par le biais d’instruments mécaniques comme des sirènes. D’autres compositeurs contemporains tels que Karlheinz Stockhausen ou Pierre Henrys’inscrivent dans cette continuité, et mènent des expériences de musique concrète réalisée à base de bruits. Les Études de bruits que Pierre Schaeffer composera en 1948 (écouter des extraits) ne sont pas si éloignées du Réveil de la cité de Russolo (entendu précédemment).

Le mouvement futuriste influence profondément de nombreux compositeurs dont l’américain George Antheil. S’autoproclamant « bad boy of music », il crée des œuvres volontairement dissonantes, bruyantes et dans lesquelles la machine tient une place prépondérante. Il s’installe à Paris en 1923 et fréquente la pointe de l’avant-garde, entre autres Joyce, Hemingway, Man Ray, Léger, Satie, Picasso. Son œuvre la plus représentative du style futuriste est son Ballet mécanique, pour orchestre, enclumes, hélices d’avion, sonnettes électriques, klaxons de voitures et pianos mécaniques (1923 : écouter un extrait). Un an plus tard, Fernand Léger en fait un film avec la participation de Man Ray (voir le film).